On peut respecter la Russie sans admirer Poutine
La présidente du Front National a ainsi affirmé : « Je ne peux qu'être inquiète quand je vois que notre président, sous l'impulsion des Américains, tourne le dos à la Russie. Suivant les Américains, les médias français diabolisent la Russie » et elle a préconisé un rapprochement avec Moscou. Et sur le fond, je suis en partie d’accord. Je crois que l’Europe doit se construire de l’Atlantique à l’Oural, que l’OTAN n’a plus de sens et qu’il faut associer la Russie à la construction européenne.
Mais Marine Le Pen prend des libertés avec la vérité en affirmant que les médias français diabolisent la Russie. Il y a une différence entre un pays et ses dirigeants et même si mon opposition à l’ingérence fait que je crois qu’on ne peut pas forcément tirer un trait étanche entre les deux, la critique des médias ne porte pas sur le pays, mais bien les pratiques autocratiques de Vladimir Poutine et de ses arrangements avec la démocratie et les libertés publiques. Nuance.
Admirer un autocrate
Marine Le Pen a également affirmé : « Je ne cache pas que dans une certaine mesure j'admire Vladimir Poutine. Il commet des erreurs, mais qui n'en commet pas ? La situation en Russie n'est pas facile, et on ne peut pas régler rapidement les problèmes issus de la chute de l'URSS ». Et cela me pose un gros problème. C’est une chose de respecter les dirigeants politiques d’un pays, même s’ils ne sont pas des démocrates, pas respect de la souveraineté nationale.
Mais cela en est une autre de dire qu’elle admire Vladimir Poutine, même si elle met des bémols. Admirer un homme qui fait reculer la démocratie et les libertés publiques dans son pays, qui créé une parodie de démocratie en montant lui-même des faux partis d’opposition est indigne d’un responsable politique républicain, ce qui démontre bien que Marine Le Pen n’en est pas une. Encore une preuve du relativisme du FN avec des comportements extrémistes.
Provocation extrémiste et politicienne
Bien sûr, Marine Le Pen a pris des précautions dans sa déclaration. Elle précise « dans une certaine mesure » et évoque des « erreurs », mais il faut noter qu’elle relativise immédiatement les « erreurs » que commet Vladimir Poutine en disant « mais qui n’en commet pas ? ». Sauf qu’il faut soit une mauvaise foi incroyable ou alors des convictions pas vraiment démocratiques pour relativiser ainsi les « erreurs » du premier ministre russe. A moins que cela ne soit les deux…
On peut également voir derrière cette déclaration un moyen de faire du « buzz », un moyen de provoquer les médias pour faire parler d’elle à un moment où l’attention pas illégitime des médias pour les élections primaires socialistes laisse moins de place au reste de l’opposition. En tout cas, ce genre de déclaration est une nouvelle pièce au dossier qui démontre bien que le Front National n’est pas un parti comme les autres et qu’il reste parfaitement infréquentable.
Marine Le Pen a bien réussi à vendre l’histoire de recentrage de son parti. Elle sait également modérer ses propos, au contraire de son père, qui aimait provoquer. Mais encore une fois, elle démontre que son parti reste fermement ancré à l’extrême droite du spectre politique.
Laurent Pinsolle